Un plan d'action pour un Plateau plus accessible et inclusif
Sylvie Gionet doit parcourir un kilomètre simplement pour acheter du lait, car les dépanneurs situés à proximité de son logement
Le maire Rabouin se veut rassurant: le but est de soutenir la culture, tout en maintenant la tranquillité des quartiers.
Alors que des résidents du Plateau sont inquiets face au bruit généré par des commerces, d’autres se rassemblent pour défendre le cabaret La Tulipe. Le maire Rabouin se veut rassurant: le but est de soutenir la culture, tout en maintenant la tranquillité des quartiers.
« Aujourd'hui, nous tenons un conseil d'arrondissement extraordinaire pour rassurer l'ensemble des établissements », a déclaré d’entrée de jeu le maire d’arrondissement, Luc Rabouin.
À la suite d’une décision rendue par la Cour d’appel du Québec le 23 septembre 2024, le cabaret La Tulipe a fermé ses portes puisqu’il doit désormais se plier aux exigences de l’article 9 du Règlement sur le bruit du Plateau-Mont-Royal. Celui-ci stipule qu’un bruit est « spécifiquement prohibé lorsqu’il s’entend à l’extérieur ou dans un autre local, quelle que soit sa destination, que celui d’où il provient. »
Pour tenter de sauver le cabaret, les élus du Plateau prévoient donc modifier l’article 9 pour spécifier qu’il ne s’applique pas aux salles de spectacle, aux bars et aux restaurants.
Reconnaissant l'inquiétude des commerçants, le maire a également souligné que la ville et l’arrondissement travaillent depuis plusieurs mois sur un projet pilote visant à réviser l'ensemble de la réglementation liée au bruit. « Nous souhaitons que nos salles de spectacle puissent continuer à fonctionner dans nos quartiers montréalais, particulièrement dans les quartiers centraux, tout en garantissant une qualité de vie aux citoyens », a affirmé le maire.
Monique Trottier, résidente du Plateau, qui habite près d’un établissement ayant récemment obtenu un permis de réception, s’inquiète de la modification de l’article 9, qui la protège du bruit excessif.
« Comment se fait-il qu’un permis de réception ait été accordé à cet endroit ? Allons-nous nous retrouver à vivre dans un environnement bruyant et invivable, alors que, jusqu’à récemment, c'était un lieu tranquille, choisi pour cette raison ? » s’interroge Mme Trottier.
Yves Beaudoin, un autre citoyen, ne comprend pas l’empressement à modifier l’article 9 et craint des répercussions néfastes pour les résidents et les familles. « Les résidents, les familles, les travailleurs, ceux qui se lèvent tôt, qui ont des enfants qui vont à l’école et qui se couchent à 20h30 après le bain. C’est une véritable boîte de Pandore que vous ouvrez », estime M. Beaudoin.
Rodrigue Escayola, habitant de la rue Duluth, piétonne et animée en saison estivale, considère que les commerçants ont pris possession de la rue et que le partage de l’espace urbain et sonore n’a pas été respecté cet été.
« Les commerçants ont organisé un total de 412 concerts. Si l'on regarde le nombre de jours concernés, cela représente six concerts par jour », déplore-t-il, craignant que l’amendement crée un traitement inéquitable.
Le maire Rabouin a tenté de rassurer les citoyens présents. « Notre intention n’est certainement pas de dégrader le cadre de vie des familles. » Il a réaffirmé à plusieurs reprises la volonté de l’arrondissement de trouver un équilibre entre les résidents vivant à proximité des salles de spectacle et la vie culturelle dynamique du Plateau.
« Nous pouvons avoir un quartier vibrant, reconnu pour sa vitalité culturelle, tout en maintenant une bonne qualité de vie. Nous posons aujourd'hui un premier geste, mais le travail de révision réglementaire, entamé depuis plusieurs mois, se poursuit », a précisé le maire.
Luc Rabouin a également confirmé que des consultations publiques seront tenues, permettant aux citoyens et aux organismes de s’exprimer. « Montréal est l'une des villes les plus agréables à vivre dans le monde, et nous voulons que cela continue », a assuré le maire.
Par ailleurs, les résidents peuvent envoyer leurs commentaires, questions et propositions à l’arrondissement en prévision de l’adoption finale de la modification de l'article 9 du Règlement sur le bruit, qui aura lieu le 7 octobre prochain.
Le même soir, une manifestation de soutien à La Tulipe s’est déroulée sur la rue Papineau. Devant l’immeuble patrimonial, à 20h, plus de 600 personnes s'étaient déjà rassemblées, sous la surveillance d’une forte présence policière. De nouveaux participants ont progressivement rejoint la foule.
« Le beau boucan en soutien à La Tulipe » a attiré l’attention de plus de 5000 personnes sur Facebook. L’invitation annonçait : « Venez défendre la culture musicale québécoise lors d’un grand rassemblement devant un lieu emblématique : le Théâtre La Tulipe, au cœur de Montréal ! Joignez-vous à cette manifestation pacifique et festive pour exprimer votre amour pour la musique, les arts et la scène locale. »
Résidents du quartier, artistes, familles et plusieurs personnalités publiques ont répondu à l’appel, manifestant leur solidarité dans un véritable « boucan d’enfer ».
Parmi eux, les membres de Terrato, un groupe de percussionnistes du Plateau actif à Montréal depuis 15 ans, ont joué un rôle central dans la manifestation. « Depuis nos débuts, nous avons vu la fermeture de plusieurs lieux comme Le Bobard, Le Divan Orange et The Groove Nation. Le Théâtre La Tulipe est un monument de 111 ans. Des erreurs ont été commises, c'est vrai, mais on les pardonne. Aujourd’hui, nous sommes ici pour soutenir ce bâtiment culturel, car ces endroits représentent 11 % de mes contrats annuels », explique Joe Mephisto, fondateur du groupe.
En après-midi, le maire Luc Rabouin avait toutefois précisé que le changement à l’article 9 ne garantirait pas nécessairement la sauvegarde du cabaret La Tulipe. Quant aux manifestants, ils envisagent de continuer à faire entendre leur voix devant l’établissement.
Abonnez-vous à notre infolettre hebdomadaire, c'est gratuit!