Un plan d'action pour un Plateau plus accessible et inclusif
Sylvie Gionet doit parcourir un kilomètre simplement pour acheter du lait, car les dépanneurs situés à proximité de son logement
L’installation de fil barbelé autour d'un terrain vacant dans le Mile End souligne l'urgence de régler le problème de la dégradation de nombreux bâtiments abandonnés.
Régulièrement, les résidents voisins de bâtiments abandonnés font part de leurs inquiétudes lors des assemblées du conseil d’arrondissement du Plateau-Mont-Royal.
Le sujet est d’ailleurs revenu à plusieurs reprises lors de l’assemblée régulière du 8 octobre dernier. La présence de squatteurs et les dangers liés à la dégradation des bâtiments sont les principales causes de craintes.
Ce sont probablement ces inquiétudes qui ont incité le propriétaire d'un terrain de la rue Saint-Laurent, situé entre les rues Saint-Viateur et Bernard, à prendre les grands moyens pour stopper les introductions indésirables.
Du fils barbelé a été posé autour de sa propriété située dans un quadrilatère qui compte un grand nombre de bâtiments vides.
Mais l’installation de fil barbelé pour éviter les intrusions est non seulement une pratique plutôt inhabituelle sur Le Plateau-Mont-Royal, elle est aussi proscrite dans la règlementation municipale. Et ce n’est pas près de changer.
« Malgré l'effet dissuasif du barbelé, il est interdit de l'utiliser pour contrôler l'accès à un bâtiment ou un terrain vacant, et il ne semble pas y avoir une volonté de changer cette norme », a confirmé Geneviève Allard, chargée de communication à la Division des relations avec les citoyens et des communications.
La situation des immeubles et terrains abandonnés n’est pas nouvelle, mais l’arrondissement possède peu d’outils pour intervenir, même si des bâtiments sont vacants et le demeurent pendant des années.
« L'arrondissement et la Ville n'ont pas les pouvoirs habilitants pour exiger leur occupation. Le pouvoir de la Ville de Montréal se limite à s'assurer que les bâtiments sur son territoire sont sécuritaires », explique Geneviève Allard.
Un exemple soulevé lors de la dernière assemblée de l’arrondissement permet de mieux comprendre la lourdeur des procédures dans ce type de dossier. Deux citoyens, Laurence Michael et Ronald Hinch, ont dénoncé l’état de délabrement avancé d’un bâtiment au coin des rues Saint-André et Bienville.
Selon les voisins, l’endroit n’est plus entretenu depuis plus de 20 ans et est inhabité depuis de nombreuses années. Sa détérioration s’accélère, les barricades qui entourent l’édifice ne tiennent plus et les squatteurs ont pris possession des lieux. Des arbres poussent à travers le toit et l’édifice est couvert de graffitis.
Malgré des années de plaintes de citoyens et de multiples infractions restées impayées, la solution est finalement venue de la Ville de Montréal qui, à la suite du dépôt d’une hypothèque légale, a finalement pu entrer en contact avec le propriétaire des lieux.
Cette action qui permet à la ville d’obtenir une garantie sur la dette du propriétaire est habituellement très efficace, selon le maire d’arrondissement Luc Rabouin.
« Quand on met une hypothèque légale sur un immeuble, en général, dans les heures qui suivent, on a une réaction (...) Et dans ce cas-ci, le propriétaire a donné signe de vie », a affirmé M. Rabouin.
Selon Marie Plourde, la ville pourra maintenant agir plus efficacement: « Avec une hypothèque légale, on a une véritable prise, l’arrondissement devient le créancier principal du propriétaire. Ça a un effet. Je pense que ça fait mal », a lancé la conseillère.
On le comprend, des cas comme celui de l’immeuble du coin des rues Saint-André et Bienville demandent énormément de temps et de ressources avant de pouvoir être réglés. Et ça ne date pas d’hier.
Déjà en 2021, Robert Beaudry, responsable de l’habitation au sein de l’administration Plante, expliquait en entrevue à La Presse que la Ville de Montréal est essentiellement impuissante devant une propriété qui pollue visuellement un quartier. On y apprenait aussi que certains propriétaires au « pur esprit spéculatif » en profitent à leur avantage.
Pour contrer ce problème, la Ville a adopté en octobre 2023 un nouveau règlement sur l’occupation et l’entretien. Celui-ci donne davantage d’outils aux inspecteurs et fait grimper le montant des amendes.
Toutefois, le processus d’implantation de ce règlement prend du temps et il faudra encore faire preuve de patience avant la disparition de ces « verrues » urbaines. En attendant, certains propriétaires préfèrent encore garder leur propriété vacante et y poser des barricades et du fils barbelé.
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