L'été des inondations à répétition: quoi faire pour s'en prémunir?

« C'était extraordinaire avant, mais ce qu'on a vu, ça va faire partie de notre réalité dans les prochaines années, » explique Iseult Séguin-Aubé, architecte-paysagiste.

C’était le déluge les 4 et 13 juillet derniers dans de nombreux sous-sol de la rue Saint-Urbain.

« L'eau entrait par un espace entre les pierres à la manière d'un robinet grand ouvert, » explique Chantal Hudon, une résidente du Mile End qui habite près de la rue Fairmount.

À ces infiltrations d’eau se sont ajoutés des refoulements d’égout qui ont endommagé à plusieurs reprises des sous-sols du quartier.

Ces épisodes étaient d’autant plus exceptionnels qu’ils ne s’étaient jamais produits auparavant pour plusieurs résidents de longue date.

« Ça fait depuis 1977 que je suis dans ma maison est c’est la première fois que nous avons subis une inondation, » constate une autre résidente du Mile End qui habite la rue Waverly.

Pluies abondantes: quand l’extraordinaire devient normal

« C'est normal que les gens disent que c'est la première fois en 20 ans, » explique Iseult Séguin-Aubé, architecte-paysagiste.

« Si on regarde les prévisions pour les précipitations, ça va devenir de plus en plus courant, à des échelles de temps plus courts. C'était extraordinaire avant, mais ce qu'on a vu, ça va faire partie de notre réalité dans les prochaines années. »

En effet, en consultant les prévisions d’Ouranos pour le Mile End, on apprend que le quartier risque de recevoir 73mm de précipitations liquides de plus entre 2021 et 2050 qu’entre 1991 et 2020.

Les prévisions de la Ville de Montréal abondent dans le même sens : « Selon les projections pour 2050, l’intensité critique des pluies augmentera en moyenne de 15 % par rapport à aujourd’hui et la fréquence des inondations risque de doubler, » peut-on lire dans ce document officiel.

L’été 2023: une saison de pluies diluviennes

Le jeudi 13 juillet, Montréal a reçu 88 mm de pluie en deux heures, ce qui équivaut à toutes les précipitations habituellement enregistrées en juillet.

Lors de situations comme celles-ci, certaines zones sont particulièrement vulnérables: il s’agit d’endroits que la ville a identifiés comme étant des « cuvettes », c’est-à-dire des creux topographiques où le sol est naturellement plus bas.

Voici un aperçu de l’emplacement de ces cuvettes dans le Mile End:

Carte des cuvettes d’eau dans le Mile End. Source: Ville de Montréal

Lorsque la capacité maximale des égouts et de la végétation est atteinte, l’eau s’accumule dans ces zones. Sans surprise, celles-ci coïncident avec les zones jugées vulnérables aux pluies abondantes:

Carte des zones de vulnérabilité (élevée et majeure) aux pluies abondantes en 2022. Source: Ville de Montréal

Le plan de Montréal pour réduire les inondations

Les égouts de la ville, construits il y a plus de 60 ans, ne sont tout simplement pas adaptés pour gérer la fréquence et l’intensité des pluies à venir.

D’une part, il y a une faiblesse au niveau de la conception même des réseaux de collecte des eaux usées du centre et de l’est de la ville (zone qui inclut le Mile End).

Le problème est que ces réseaux sont unitaires. Cela signifie qu’il n’y a qu’une seule conduite pour recevoir à la fois les eaux sanitaires et la pluie.

Un réseau unitaire, contrairement à un réseau séparatif comme celui que l’on retrouve dans l’ouest de la ville, devient rapidement surchargé lors de fortes pluies et cela augmente les risques de débordements.

D’autre part, les réseaux ont été mal entretenus depuis des décennies. En moyenne, chaque année, 40 à 45 km de conduites d’égout sont réhabilitées, notamment en utilisant la technique du gainage.

Mais les besoins en investissements pour remettre en état les égouts à Montréal sont gigantesques. En 2010, ils étaient évalués à 1 473 M$.

C’est pourquoi la ville mise également sur d’autres solutions moins coûteuses, notamment la rétention de l’eau sur le domaine public.

Depuis 2022, la Ville a aménagé sept parcs « éponges », comme la Place des Fleurs-de-Macadam sur l’avenue Mont-Royal, ainsi que 800 trottoirs « éponges » où l’on retrouve des espaces végétalisés.

Ces infrastructures ont la particularité de capter une portion de la pluie pour éviter qu’elle ne prenne directement le chemin des égouts.

La ville prévoit continuer ses efforts pour adapter le territoire et a pour objectif d’aménager d’ici 2025 « au moins 8 500 m² d’infrastructures vertes drainantes sur rue et de retenir l’équivalent de 3 piscines olympiques en eau. »

Les efforts du Plateau-Mont-Royal pour réduire les inondations

En plus de la création du parc éponge de la Place des Fleurs-de-Macadam, l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal a également favorisé la création de ruelles vertes où une partie de l’asphalte est remplacée par de la terre, des végétaux et des arbres.

On compte maintenant près de 120 ruelles vertes dans l’arrondissement.

« Si on a des arbustes, une diversité végétale dans un endroit, un écosystème plus varié, c'est sûr que cela a plus de capacité de gérer l’eau, » confirme Iseult Séguin-Aubé.

Le Plateau-Mont-Royal a aussi une équipe externe qui nettoie les conduites en continu dans l'arrondissement. Cela évite les dépôts et permet aux tuyaux de fonctionner à plein régime.

Ce sont 5 000 mètres de conduites qui sont nettoyés chaque année, ce qui permet d'estimer que chaque conduite est nettoyée une fois tous les trois ans.

Des astuces pour réduire les risques d’inondation chez soi

À l’échelle individuelle, certaines mesures peuvent également être prises pour réduire les risques d’inondation.

« Puisque mon sous-sol est maintenant à nu, le moment est idéal pour apporter des changements rendant mon logement moins vulnérable. Mais quoi? » se demande Christian Gagnon, un résident de la rue Jeanne-Mance, qui a subi deux inondations cet été.

Les guides et les experts conseillent de se concentrer sur trois éléments :

1.     L’installation (par un entrepreneur en plomberie membre de la CMMTQ) d’un clapet antiretour ou antirefoulement.

2.     Faire des modifications à votre immeuble pour qu’il soit à l’épreuve de la pluie. Ce guide explique en détail les différents correctifs à apporter pour réduire le risque d’inondation.

Cette image est tirée du Guide de prévention des inondations de sous-sols de l’Institut de prévention des sinistres catastrophiques.

3.     Finalement, il est possible d’opter pour des aménagements paysagers qui dirigent l’eau de pluie vers des surfaces perméables, ce qui évite de surcharger les égouts.

« Si l’eau s’infiltre tranquillement dans une cour arrière parce qu'on a un jardin, des arbres, elle ne s'en va pas dans la rue. Mais si en arrière, c'est un stationnement imperméable, elle part du toit au stationnement, puis de la rue ou de la ruelle au réseau, » explique Iseult Séguin-Aubé.

Image tirée du Guide des bonnes pratiques en matière d’urbanisme et de gestion des eaux pluviales réalisé par le Service de l’eau de la Ville de Montréal.

« Ce sont des choses que l’on doit faire maintenant et de plus en plus urgemment parce qu'on va avoir à gérer [les pluies abondantes] régulièrement avec le changement climatique, » ajoute-elle.

Génial ! Vous vous êtes inscrit avec succès.

Bienvenue de retour ! Vous vous êtes connecté avec succès.

Vous êtes abonné avec succès à Mon Plateau.

Succès ! Vérifiez votre e-mail pour obtenir le lien magique de connexion.

Succès ! Vos informations de facturation ont été mises à jour.

Votre facturation n'a pas été mise à jour.